Page:Stendhal - Lucien Leuwen, III, 1929, éd. Martineau.djvu/30

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Sur les dix heures arriva à grand bruit M. de Torpet[1], jeune ex-député, fort bel homme, et rédacteur éloquent d’un journal ministériel.

« Avez-vous lu le Messager, madame ? dit-il en s’approchant de la maîtresse de la maison d’un air commun, presque familier, et comme prenant acte de sa familiarité avec une jeune femme dont le monde s’occupait. Avez-vous lu le Messager ? Ils ne peuvent répondre à ces quelques lignes que j’ai lancées ce matin sur l’exaltation et le dernier période des idées de ces réformistes. J’ai traité en quelques mots l’augmentation du nombre des électeurs. L’Angleterre en a 800.000, et nous 180.000 seulement ; mais si je jette un coup d’œil rapide sur l’Angleterre, que vois-je avant tout ? Quelle sommité frappe mes yeux de son éclat brillant ? Une aristocratie puissante et respectée, une aristocratie qui a des racines profondes dans les habitudes de ce peuple sérieux avant tout, et sérieux parce qu’il est biblique. Que vois-je de ce côté-ci du détroit ? Des gens riches pour tout potage. Dans deux ans, l’héritier de leur richesse et de leur nom sera peut-être à Sainte-Pélagie… »

  1. De Salvandy.