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Bernard promené par Louis XIV dans les jardins de Versailles. »

Cette idée suffit pour rendre à M. Leuwen tout le feu de la première jeunesse. Il ne se dissimula point le petit moment de trouble qu’avait causé le message de Sa Majesté, et moins encore le ridicule que lui eût donné ce trouble s’il eût été coté au foyer de l’Opéra.

Jusque-là, il n’y avait eu entre le roi et M. Leuwen que des phrases polies au bal ou à dîner. Il avait dîné deux ou trois fois avec le roi dans les premiers temps qui suivirent la révolte de Juillet. Elle portait alors un autre nom, et Leuwen, difficile à tromper, avait été un des premiers à discerner la haine qu’inspirait un exemple aussi pernicieux. Alors, il avait lu dans ce regard auguste :

« Je vais faire peur aux propriétaires et leur persuader que c’est la guerre des gens qui n’ont rien contre ceux qui ont quelque chose. »

Afin de ne pas passer pour aussi bête que quelques députés campagnards invités avec lui, Leuwen avait dirigé quelques plaisanteries enveloppées contre cette idée, que personne n’exprimait.

Leuwen craignit un instant qu’on ne voulût compromettre le petit commerce de Paris en lui faisant répandre du sang.