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tait, par des citations. Le monstre avait une mémoire étonnante.

Madame Grandet était excessivement contrariée.

« Comme madame de Staël, se disait-elle, eût été belle dans ce moment, au milieu d’un cercle si nombreux et si attentif ! Je vois au moins trente personnes qui nous écoutent, et moi, grand Dieu ! je vais rester sans un mot à répondre, et il est trop tard pour se fâcher. »

En comptant les auditeurs qui, après s’être moqués de l’étrange tournure de l’Allemand, commençaient à l’admirer, précisément à cause de sa dégaine étrange et de sa façon nouvelle de relever ses lunettes, les yeux de madame Grandet rencontrèrent ceux de Lucien. Dans sa terreur, elle lui demanda presque grâce. Elle venait d’éprouver que ses regards les plus enchanteurs n’avaient aucun effet sur le jeune Allemand, qui s’écoutait parler et ne voyait rien.

Lucien vit dans ce regard suppliant un appel à sa bravoure ; il perça le cercle, vint se placer auprès du jeune dialecticien allemand.

« Mais, monsieur. . . . . . . . . . . .[1]

  1. Stendhal a laissé la phrase en suspens, et a noté en marge son intention de demander à M. J. J. Ampère, une objection, la moins mauvaise. N. D. L. E.