— Voulez-vous, monsieur, ou ne voulez-vous pas faire passer ma dépêche ?
— Eh bien ! monsieur, jusqu’à ce moment c’est moi qui suis préfet du Calvados, et je vous réponds : Non.
Ce non fut dit avec la rage d’un pédant outragé.
— Monsieur, je vais avoir l’honneur de vous faire ma question par écrit. J’espère que vous oserez me répondre par écrit aussi, et je vais envoyer un courrier au ministre.
— Un courrier ! un courrier ! Vous n’aurez ni chevaux, ni courrier, ni passeport. Savez-vous, monsieur, qu’au pont de *** il y a ordre de ne laisser rien passer sans passeport signé de moi, et encore avec un signe particulier ?
— Eh bien ! monsieur le préfet, dit Leuwen en mettant un intervalle fort marqué entre chacun de ses mots, il n’y a plus de gouvernement possible du moment que vous n’obéissez pas au ministre de l’Intérieur. J’ai des ordres pour le général, et je vais lui demander de vous faire arrêter.
— Me faire arrêter, morbleu !
Et le petit préfet se lança sur Leuwen, qui prit une chaise et l’arrêta à trois pas de distance.
— Monsieur le préfet, avec ces façons-là