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de police avaient ordre de ne point avoir d’appartements pour les partisans de M. Mairobert.

Le préfet, M. Boucaut, donna l’autorisation de loger MM. Leuwen et Coffe. À peine dans leurs chambres, un monsieur très jeune, fort bien mis, mais évidemment armé de pistolets, vint remettre sans mot dire à Leuwen deux exemplaires d’un petit pamphlet in-18, couvert de papier rouge et fort mal imprimé. C’était la collection de tous les articles ultra-libéraux que M. Boucaut de Séranville avait publiés dans le National, le Globe, le Courrier, et autres journaux libéraux de 1829.

— Ce n’est pas mal, disait Leuwen ; il écrit bien.

— Quelle emphase ! Quelle plate imitation de M. de Chateaubriand ! À tous moments, les mots sont détournés de leur sens naturel, de leur acception commune.

Ces messieurs furent interrompus par un agent de police qui, avec un sourire faux et en faisant force questions, vint leur remettre deux pamphlets in-8o.

— Voilà du luxe ! C’est l’argent des contribuables, dit Coffe. Je parierais que c’est un pamphlet de gouvernement.

— Eh ! parbleu, c’est le nôtre, dit Leuwen, c’est celui que nous avons perdu à Blois ; c’est du Torpet tout pur.