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dit à la porte du renégat aux vingt places. « Il est drôle, mon cousin, se dit Lucien ; c’est absolument comme madame Grandet, qui prétend qu’il est important pour moi que j’aille à la messe : Cela est indispensable surtout quand on est destiné à une belle fortune et qu’on ne porte pas un nom. Parbleu ! je serais bien fou de faire des choses ennuyeuses ! Qui prend garde à moi dans Paris ? »

Six semaines après le sermon d’Ernest Dévelroy, Lucien se promenait dans sa chambre ; il suivait avec une attention scrupuleuse les compartiments d’un riche tapis de Turquie ; madame Leuwen l’avait fait enlever de sa propre chambre et placer chez son fils, un jour qu’il était enrhumé. À la même occasion, Lucien avait été revêtu d’une robe de chambre magnifique et bizarre bleue et or et d’un pantalon bien chaud de cachemire amarante.

Dans ce costume il avait l’air heureux, ses traits souriaient. À chaque tour dans la chambre, il détournait un peu les yeux, sans s’arrêter pourtant ; il regardait un canapé, et sur ce canapé était jeté un habit vert, avec passe-poils amarante, et à cet habit étaient attachées des épaulettes de sous-lieutenant.

C’était là le bonheur.