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appris, depuis longtemps, bien des choses sur M. Leuwen père. « Dans cette maison, se disait-il, je trouverai un excellent dîner gratis, des hommes considérables, à qui je pourrai parler et qui me protégeront en cas de malheur. Au moyen des Leuwen je ne serai pas isolé dans cette Babylone. Ce petit jeune homme écrit tout à ses parents ; ils savent déjà sans doute que je le protège ici. »

Mesdames de Marcilly et de Commercy, âgées l’une et l’autre de bien plus de soixante ans, et chez lesquelles Lucien eut le bon esprit de se laisser fort souvent inviter à dîner, l’avaient présenté à toute la ville. Lucien suivait à la lettre les conseils que lui donnait mademoiselle Théodelinde.

Il n’eut pas passé huit jours dans la bonne compagnie qu’il s’aperçut qu’elle était déchirée par un schisme violent.

D’abord on eut honte de cette division, et on voulut la cacher à un étranger ; mais l’animosité et la passion l’emportèrent ; car c’est là un des bonheurs de la province : on y a encore de la passion.

M. de Vassigny et les gens raisonnables croyaient vivre sous le règne de Henri V ; tandis que Sanréal, Ludwig Roller et les plus ardents n’admettaient pas les abdications de Rambouillet et attendaient