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gent, et, dans un bon moment, mille écus ne lui coûteraient rien pour acheter ma grâce de quelque chef de bureau ! »

Lucien apprit par le chevalier Bilars qu’il y avait à Nancy un médecin célèbre par un rare talent, et, de plus, fort bien venu dans la société à cause de son éloquence et de ses opinions furibondes de légitimité : on l’appelait M. Du Poirier. Par tout ce que disait le chevalier Bilars, Lucien comprit que ce docteur pourrait bien être le factotum de la ville, et, dans tous les cas, un intrigant amusant à voir.

— Il faut absolument, mon cher docteur, que vous m’ameniez demain ce monsieur Du Poirier ; dites-lui que je suis en danger.

— Mais vous n’êtes pas en danger !

— Mais n’est-il pas fort bien de commencer par un mensonge nos relations avec un fameux intrigant ? Une fois qu’il sera ici, ne me contredisez en rien ; laissez-moi dire, nous en entendrons de belles sur Henri V, sur Louis XIX, et peut-être nous amuserons-nous un peu.

— Votre blessure est tout à fait chirurgicale, et je ne vois pas ce qu’un docteur en médecine, etc., etc.

Le chevalier Bilars consentit enfin à