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déclarations du jury, Ménuel fut condamné aux galères.

Ménuel, dans sa prison, faisait venir du vin et était presque toujours en pointe de gaieté ; il avait des remords, et, se regardant comme un homme à jamais perdu, il voulait passer gaiement le peu de jours qui lui restaient.

Les geôliers, les porte-clefs de la prison, tous l’aimaient. Un jour il vit apporter dans la loge du portier huit ou dix gros paquets de cordes, destinées à renouveler celles de toutes les jalousies de la prison. Une idée le saisit ; il vola à l’instant un écheveau de ces cordes. Il eut le bonheur de n’être pas vu et, la nuit même, en escaladant deux murailles d’une hauteur très respectable, il parvint à se sauver. Il courut remettre à un ami de Perret les cent cinquante francs qu’il devait ; cet ami était un de ceux qui avaient le plus aidé le père de Perret à le faire condamner[1]. Mais à Bayonne, la mode changeant, on commençait à trouver sévère la condamnation de Ménuel. L’ami de Perret, en voyant Ménuel, eut pitié de lui, et à l’instant le plaça sur un bateau qui allait partir avant le jour pour la pêche.

  1. Preuve : M. Clément de la Roncière.