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une réception brillante dans toutes les maisons nobles de la Lorraine. » Ce fut dans ces idées que Lucien écrivit à son père.

Au lieu du paquet énorme qu’il attendait avec impatience, il ne reçut de la sollicitude paternelle qu’une toute petite lettre écrite sur le papier le plus exigu possible.

« Très aimable sous-lieutenant, vous êtes jeune, vous passez pour riche, vous vous croyez beau sans doute, vous avez du moins un beau cheval, puisqu’il coûte cent cinquante louis. Or, dans les pays où vous êtes, le cheval fait plus de la moitié de l’homme. Il faut que vous soyez encore plus piètre qu’un saint-simonien ordinaire pour n’avoir pas su vous ouvrir les manoirs des noblilions de Nancy. Je parie que Méllinet (un domestique de Lucien) est plus avancé que vous et n’a que l’embarras du choix pour ses soirées. Mon cher Lucien, studiate la matematica et devenez profond. Votre mère se porte bien, ainsi que votre dévoué serviteur.

François Leuwen. »

Lucien se serait donné au diable après une telle lettre. Pour l’achever, le soir, en rentrant de cette promenade qui ne