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n’est pas malin. C’est le docteur Du Poirier, le premier médecin du pays, qui est son bras droit. M. Du Poirier, qui est une fine mouche, mène par le nez tant M. de Pontlevé que M. de Puylaurens, l’autre commissaire de Charles X ; car l’on conspire ouvertement ici. Il y a aussi l’abbé Olive qui est un espion…

— Mais, mon cher monsieur, dit Lucien en riant, je ne m’oppose pas à ce que M. l’abbé Olive soit un espion ; tant d’autres le sont bien ! mais parlez-moi encore un peu, je vous prie, de cette jolie femme, madame de Chasteller.

— Ah ! cette jolie femme qui a ri quand vous êtes tombé de cheval ? Elle en a vu bien d’autres descendre de cheval ! Elle est veuve d’un des généraux de brigade attachés à la personne de Charles X, et qui était, de plus, grand chambellan ou aide de camp ; un grand seigneur, enfin, qui après les journées, est venu mourir ici de peur. Il croyait toujours que le peuple était dans les rues, comme il me l’a dit plus de vingt fois ; mais bon enfant quoique ça, point insolent, au contraire, fort doux. Quand il leur arrivait certains courriers de Paris, il voulait qu’il y eût toujours une paire de chevaux réservée pour lui à la poste et qu’il payait bien, da. Car, monsieur, il faut que vous sachiez qu’il n’y a que