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CHAPITRE IV


Pendant que le baron Thérance faisait ce triste tableau de la ville de Nancy, le 27e régiment de lanciers s’en approchait, parcourant la plaine la plus triste du monde ; le terrain sec et pierreux paraissait ne pouvoir rien produire. C’est au point que Lucien remarqua un certain endroit, à une lieue de la ville, duquel on n’apercevait que trois arbres en tout ; et encore celui qui croissait sur le bord de la route était tout maladif et n’avait pas vingt pieds de haut. Un lointain fort rapproché était formé par une suite de collines pelées ; on apercevait quelques vignes chétives dans les gorges formées par ces vallées. À un quart de lieue de la ville, deux tristes rangées d’ormes rabougris marquaient le cours de la grande route. Les paysans que l’on rencontrait avaient l’air misérable et étonné. « Voilà donc la belle France ! » se disait Lucien. En approchant davantage, le régiment passa devant ces grands établissements utiles, mais sales qui annoncent si tristement une civilisation