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la condamnation à mort

homme d’esprit et fort renommé comme tel.

Mathilde a de la singularité, pensa-t-il ; c’est un inconvénient, mais elle donne une si belle position sociale à son mari ! Je ne sais comment fait ce marquis de La Mole ; il est lié avec ce qu’il y a de mieux dans tous les partis ; c’est un homme qui ne peut sombrer. Et d’ailleurs, cette singularité de Mathilde peut passer pour du génie. Avec une haute naissance et beaucoup de fortune, le génie n’est point un ridicule, et alors quelle distinction ! Elle a si bien d’ailleurs, quand elle veut, ce mélange d’esprit, de caractère et d’à-propos, qui fait l’amabilité parfaite… Comme il est difficile de faire bien deux choses à la fois, le marquis répondait à Mathilde d’un air vide, et comme récitant une leçon :

— Qui ne connaît ce pauvre Altamira ? Et il lui faisait l’histoire de sa conspiration manquée, ridicule, absurde.

— Très-absurde ! dit Mathilde, comme se parlant à elle-même, mais il a agi. Je veux voir un homme ; amenez-le-moi, dit-elle au marquis très-choqué.

Le comte Altamira était un des admirateurs les plus déclarés de l’air hautain et presque impertinent de mademoiselle de