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une croix pectorale. Il se prosterna : l’évêque lui adressa un sourire de bonté et passa. Le bel abbé le suivit, et Julien resta seul dans le salon dont il put à loisir admirer la magnificence pieuse.

L’évêque de Besançon, homme d’esprit éprouvé, mais non pas éteint par les longues misères de l’émigration, avait plus de soixante-quinze ans, et s’inquiétait infiniment peu de ce qui arriverait dans dix ans.

— Quel est ce séminariste au regard fin, que je crois avoir vu en passant ? dit l’évêque. Ne doivent-ils pas, suivant mon règlement, être couchés à l’heure qu’il est ?

— Celui-ci est fort éveillé, je vous jure, Monseigneur, et il apporte une grande nouvelle : c’est la démission du seul janséniste qui restât dans votre diocèse. Ce terrible abbé Pirard comprend enfin ce que parler veut dire.

— Eh bien ! dit l’évêque en riant, je vous défie de le remplacer par un homme qui le vaille. Et pour vous montrer tout le prix de cet homme, je l’invite à dîner pour demain.

Le grand vicaire voulut glisser quelques mots sur le choix du successeur. Le prélat, peu disposé à parler d’affaires, lui dit :

— Avant de faire entrer cet autre, sachons un peu comment celui-ci s’en va.