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laid sur une âme faite pour aimer ce qui est beau.

L’homme qui écrivait leva la tête ; Julien ne s’en aperçut qu’au bout d’un moment, et même, après l’avoir vu, il restait encore immobile comme frappé à mort par le regard terrible dont il était l’objet. Les yeux troublés de Julien distinguaient à peine une figure longue et toute couverte de taches rouges, excepté sur le front, qui laissait voir une pâleur mortelle. Entre ces joues rouges et ce front blanc, brillaient deux petits yeux noirs faits pour effrayer le plus brave. Les vastes contours de ce front étaient marqués par des cheveux épais, plats et d’un noir de jais.

— Voulez-vous approcher, oui ou non ? dit enfin cet homme avec impatience.

Julien s’avança d’un pas mal assuré, et enfin, prêt à tomber et pâle, comme de sa vie il ne l’avait été, il s’arrêta à trois pas de la petite table de bois blanc couverte de carrés de papier.

— Plus près, dit l’homme.

Julien s’avança encore en étendant la main, comme cherchant à s’appuyer sur quelque chose.

— Votre nom ?

— Julien Sorel.

— Vous avez bien tardé, lui dit-on,