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— Oui, madame, où j’ai eu l’honneur de passer pour l’espion de M. le maire.

— S’il m’avait cru, il eût fait un voyage.

À ce moment, M. de Rênal parut ; il était fort sombre. Le dîner se passa sans mot dire. M. de Rênal ordonna à Julien de suivre les enfants à Vergy, le voyage fut triste. Madame de Rénal consolait son mari :

— Vous devriez y être accoutumé, mon ami.

Le soir, on était assis en silence autour du foyer domestique ; le bruit du hêtre enflammé était la seule distraction. C’était un des moments de tristesse qui se rencontrent dans les familles les plus unies. Un des enfants s’écria joyeusement :

— On sonne ! on sonne !

— Morbleu ! si c’est M. de Saint-Giraud qui vient me relancer sous prétexte de remercîment, s’écria le maire, je lui dirai son fait ; c’est trop fort. C’est au Valenod qu’il en aura l’obligation, et c’est moi qui suis compromis. Que dire, si ces maudits journaux jacobins vont s’emparer de cette anecdote, et faire de moi un M. Nonante-cinq ?

Un fort bel homme, aux gros favoris noirs, entrait en ce moment à la suite du domestique.

— M. le maire, je suis il signor Geronimo.