Page:Stendhal - Le Rouge et le Noir, I, 1927, éd. Martineau.djvu/262

Cette page a été validée par deux contributeurs.

possibilité de vivre encore sous le même toit avec Julien. Elle cherchait les idées qu’elle croyait les plus propres à guider la colère aveugle de son mari. Elle avait été insensible à toutes les réflexions injurieuses qu’il lui avait adressées, elle ne les écoutait pas, elle songeait alors à Julien. Sera-t-il content de moi ?

— Ce petit paysan que nous avons comblé de prévenances et même de cadeaux, peut être innocent, dit-elle enfin, mais il n’en est pas moins l’occasion du premier affront que je reçois… Monsieur ! quand j’ai lu ce papier abominable, je me suis promis que lui ou moi sortirions de votre maison.

— Voulez-vous faire un esclandre pour me déshonorer et vous aussi ? Vous faites bouillir du lait à bien des gens dans Verrières.

— Il est vrai, on envie généralement l’état de prospérité où la sagesse de votre administration a su placer vous, votre famille et la ville… Eh bien ! je vais engager Julien à vous demander un congé pour aller passer un mois chez ce marchand de bois de la montagne, digne ami de ce petit ouvrier.

— Gardez-vous d’agir, reprit M. de Rênal avec assez de tranquillité. Ce que j’exige avant tout, c’est que vous ne lui