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de l’éditeur

toujours qu’un domestique, il jure de se venger. Et dans l’église du curé de Brangues, son bienfaiteur, le 22 juin 1827, il tire pendant la messe un coup de pistolet sur Mme  Michoud. En décembre, il passe devant la cour d’assises de l’Isère ; il est condamné et porte sa tête sur l’échafaud le 23 février 1828. Il avait vingt-cinq ans.

Ce canevas si sec, l’ai-je emprunté au roman de Stendhal ? Non point : ce fait passionnel est rigoureusement authentique, et les lecteurs de la Gazette des Tribunaux ont pu le lire à l’époque dans leur journal. Mais changeons, si vous le voulez bien, quelques noms. Berthet deviendra Julien Sorel ; Mme  Michoud sera Mme  de Rénal, et son amie, Mme  Marigny, Mme  Derville ; M. de Cordon s’appellera le marquis de La Mole et Mlle de Cordon : Mathilde de La Mole. Le village de Brangues sera baptisé Verrières. Voilà ce qu’a fait Stendhal. À part cela, il n’a rien changé au fait divers lui-même et si dans un roman le lecteur n’est curieux que de savoir comment l’histoire finit, le compte rendu des assises de l’Isère en décembre 1827 lui a dit tout ce qui peut l’intéresser. Il n’a plus besoin d’ouvrir l’œuvre du romancier.

Ceux qui se soucient au contraire de la vraisemblance des actions humaines, du ressort des grandes passions, de la logique