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cher que peu d’importance à ce qui est un si grand objet pour toutes les femmes qui font, par vice ou par avarice, tout ce qu’elle se permet par suite de la légèreté de son singulier caractère. Avec l’ouverture de cœur et avec l’affection qu’elle me montre, je n’aurais qu’à dire un mot. »

Dans la soirée, cette idée parut si terrible à la vraie piété de l’abbé Clément, qu’il fut sur le point de partir à l’instant même pour la Normandie. Il ne put fermer l’œil de la nuit. Le lendemain matin, ses agitations redoublèrent. « Mais peut-être, se disait-il, Lamiel est sur le point de revenir à des sentiments honnêtes. Si je parviens à la persuader, les actions suivront rapidement la conviction de l’esprit… Si je m’éloigne, l’occasion est à jamais perdue, je me reprocherai éternellement la perte d’une âme si belle et si noble, malgré ses souillures. Sa tête l’a égarée, mais le cœur est pur. »

Dans son trouble extrême, l’honnête jeune homme alla consulter M. l’abbé Germar, son directeur, qui, touché de sa vertu, ne balança pas : il lui ordonna de rester à Paris et d’entreprendre la conversion de Lamiel.

Le rendez-vous avait été indiqué par Lamiel dans une petite auberge de Villejuif où, un jour, un malaise soudain avait forcé