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on arrivait au spectacle à neuf heures, et l’entrée de Lamiel produisait tout l’effet désirable. Mais le comte la grondait chaque fois de l’affectation qu’elle mettait à ne pas faire de bruit en entrant dans sa loge.

— Voulez-vous donc avoir l’air éternellement d’une femme de chambre qui profite de la loge et de la toilette de sa maîtresse ?

Les grâces charmantes qui faisaient de Lamiel un être si nouveau pour Paris en 183…, et qui, en un instant, la mettaient à la première place dans tous les salons de femmes faciles, où elle débutait, n’avaient aucun mérite aux yeux du comte, même lui déplaisaient. Ces grâces, si piquantes, devaient tout leur empire : 1o À la nouveauté ; 2o À leur naturel exquis et précisément à ce qui montrait à chaque instant que Lamiel ne devait pas ce qu’elle était seulement à un salon du grand monde. Elle comprenait les grâces de la bonne société, elle avait même appris à leur être exclusivement fidèle, mais aussi elle avait compris que les grâces outrées, telles qu’elles s’étaient formées sous les règnes de Charles X et de Louis XVIII, étaient d’un ennui complet. Elle avait toujours présent à l’esprit le salon de la duchesse de Miossens où elle s’était ennuyée jusqu’au point d’en tomber malade. C’était à cet ennui d’autrefois