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et, pour tout dire en un mot, son ton parfait qui lui faisaient tort aux yeux de sa ci-devant maîtresse. Elle donnait les noms de timidité et de prudence extrême aux façons vraiment simples et naturelles de cet aimable jeune homme, tandis que l’enluminure du comte lui semblait peindre le caractère le plus énergique ; elle le voyait se lançant, avec une hardiesse vraiment chevaleresque, au milieu de l’imprévu des événements.

Dès le lendemain, le comte, qui l’épiait derrière sa porte entr’ouverte, hasarda de lui parler comme elle montait chez elle. Elle répondit à ce qu’il disait avec une raison froide, mais ne parut point choquée de sa démarche. Lamiel portait le naturel de son caractère écrit sur le front.

« Elle est à moi, se dit le comte, mais comment l’habiller ? Cela n’a aucun fond de garde-robe. Dieu sait ce qu’il y a dans ces deux grandes malles que j’ai vu monter chez elle ! Je ne lui fais pas la cour pour avoir du plaisir obscurément dans un hôtel, comme un étudiant en droit. Je ne vais pas user mes forces obscurément. Si je la désire, c’est pour montrer mon luxe ; c’est pour la montrer à l’Opéra et au bois de Boulogne, c’est parce qu’il s’agit d’une primeur, c’est parce que j’aurai à conter son histoire où je mettrai