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et Lamiel le trouva fort ressemblant à son portrait : « C’est bien là, se disait-elle, l’être insignifiant dont le portrait dans la chambre de Madame n’est regardé qu’à cause de la beauté du cadre. » De son côté, dans le moment de tranquillité que lui laissèrent ses remords, Fédor se disait :

« C’est donc là cette petite paysanne, qui, à force d’adresse normande et de complaisances bien calculées, a su gagner la faveur de ma mère, et, qui plus est, la sait conserver. » Comme tout ce qui environnait Fédor, la cuisine dans laquelle il l’avait entrevue, l’oncle Hautemare et sa femme encore toute triste de s’être exposée à tarir la source des petits cadeaux dont la duchesse l’accablait, étaient choses trop connues et ennuyeuses pour Lamiel, toute son attention revenait malgré elle à ce jeune militaire si mince, si pâle, et qui avait l’air tellement contrarié. Ainsi avait eu lieu cette entrevue dont l’image avait fait tant de peur au docteur Sansfin. À chaque instant, Mme Hautemare s’approchait de sa nièce et lui disait à voix basse :

— Mais fais donc les honneurs de la maison ; toi qui as tant d’esprit, parle donc à ce jeune duc, ou bien il va croire que nous sommes de grossiers paysans.