Page:Stendhal - Lamiel, 1928, éd. Martineau.djvu/157

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à l’égard de cet homme aimable, dans une position vraiment extraordinaire. Au bout d’un quart d’heure, elle en fut charmée, car tout ce qui donnait une pâture à son esprit faisait son bonheur, et ici, il y avait à deviner ce qui avait pu troubler à ce point le jeune abbé. Lamiel ne l’avait jamais vu aussi joli.

« Quelle différence, se disait-elle, entre cette figure et celle d’un Sansfin ! je lui demandais qu’est-ce que c’est que l’amour ? eh bien, sans le vouloir, il me l’a montré. Il faut que je me décide. A-t-il de l’amour pour moi ? Il me voit tous les jours et toujours avec la plus vive joie, il me parle avec une amitié sincère et vive. Par exemple, j’en suis sûre, il aime bien mieux m’adresser la parole que parler à Mme la duchesse, et cependant, elle sait tant de choses ! elle a des façons de parler si flatteuses pour la personne à laquelle elle adresse la parole ! Oui, mais Sansfin dit que la méchanceté qui est dans le cœur d’une femme paraît toujours dans ses traits, et la duchesse est méchante ; l’autre jour, quand Mme la comtesse de Sainte-Foi a versé, en retournant d’ici chez elle, Mme la duchesse en a été contente, et moi, j’avais les larmes aux yeux ; je suis sûre de ce mauvais sentiment de la duchesse, car Mme Anselme l’a remarqué ainsi que moi