Page:Stendhal - Lamiel, éd. Stryienski, 1889.djvu/264

Cette page a été validée par deux contributeurs.

argent, à savoir ce que c’est que l’amour, mais deux mois de tête-à-tête, grand Dieu ! et dans ce Rouen si enfumé encore, où je ne connais personne !

Une idée illumina Lamiel ! « Quand je le retrouvai après avoir été exposée aux politesses de ces bêtes brutes de commis voyageurs faisant les Lovelace, il me parut aimable ; il faut le chasser pour trois jours.

« Mon ami, lui dit-elle, allez passer trois ou quatre jours avec Mme  la duchesse ; je lui dois beaucoup de reconnaissance et si jamais elle apprend que c’est à moi qu’elle a l’obligation de la vie désordonnée que vous menez à Rouen, elle pourrait me croire ingrate et j’en serais au désespoir. »

Cette idée d’ingratitude choqua Fédor et lui parut de mauvais ton ; elle suppose une sorte d’égalité, et sans y avoir jamais réfléchi, avec la raison que lui avait faite la géométrie, il lui semblait que la nièce d’un chantre de campagne devait toutes sortes d’égards à une dame du rang de sa mère, quand bien même celle-ci n’aurait jamais de bontés pour elle, et qu’il y avait du ridicule à aller chercher le mot de reconnaissance. De plus il n’avait nulle envie d’aller s’exposer à des ser-