Page:Stendhal - Lamiel, éd. Stryienski, 1889.djvu/175

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Mais peut-être, ajoutait-elle, tout ce que l’abbé Clément me dit contre l’amour, c’est parce que l’archevêque de Rouen le lui ordonne sous peine de perdre sa place. En ce cas, il fait très bien de parler ainsi, mais moi, je serais une sotte, dont il se moquerait au fond du cœur, si je croyais le plus petit mot de tout ce qu’il me dit ; quand il me parle de littérature anglaise, c’est fort différent, ces choses-là n’intéressent pas son évêque qui, peut-être, ne sait pas l’anglais. On veut me tromper sur tout ce qui a rapport à l’amour, et pourtant il ne se passe pas de journées que je ne lise quelques pages relatives à cet amour. Les gens qui font l’amour sont-ils dans la classe des dupes ou des gens d’esprit ?

Lamiel fit cette question à son oracle, mais le docteur Sansfin avait trop d’esprit pour répondre nettement.

— Rappelez-vous bien, ma belle amie, lui dit-il, que je refuse nettement de répondre à cette question. Seulement souvenez-vous qu’il y a un extrême danger pour vous à chercher de vous en éclaircir ; c’est comme le secret terrible des Mille et une nuits, ces contes qui vous amusent tant : lorsque le héros veut s’en éclaircir, un énorme