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ces jeunes paysannes bien parées que l’on voit aller tous les dimanches à la danse de leur village.

Cette danse étant environnée de tous les côtés de couples se promenant sous les arbres en se tenant tendrement par la main, Lamiel n’était pas sans avoir remarqué plusieurs de ces couples, et cette façon de se donner en spectacle lui avait semblé choquante ; c’était là tout ce qu’elle savait de réservé sur l’amour lorsqu’elle revint à la chaumière. À cette époque, le bonhomme Hautemare crut devoir lui expliquer plus nettement le danger. Il lui parla souvent de l’énorme péché qu’il y avait à aller se promener au bois avec un jeune homme.

« Eh bien ! j’irai me promener au bois avec un jeune homme », se dit Lamiel.

Tel fut le résultat des longues réflexions qui suivirent sa conversation avec l’abbé Clément.

« Je veux savoir absolument, se dit-elle, ce que c’est que l’amour. Mon oncle dit que c’est un grand crime, mais qu’importent les idées d’un imbécile tel que mon oncle ? C’est comme le grand crime que trouvait ma tante Hautemare à mettre du bouillon gras dans la soupe du vendredi : Dieu en était profondément offensé ; et je vois ici