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lui donna des remèdes qui devaient redoubler tous les accidents de la maladie. Cette ruse du coquin eut un succès qui le ravit. La duchesse elle-même devint malade, et comme, malgré une apparence d’égoïsme épouvantable mais qui ne tenait qu’à la hauteur, elle avait l’âme bonne au fond, elle se reprocha amèrement de n’avoir pas voulu permettre qu’on transportât Lamiel chez ses parents. Ce transport eut lieu et le médecin bossu se dit : « Je serai le remède. »

Il entreprit d’amuser la femme malade et de lui peindre la vie en beau ; il employa vingt moyens ; par exemple, il prit un abonnement à la Gazette des Tribunaux et on la lisait à Lamiel tous les matins. Les crimes l’intéressaient, elle était sensible à la fermeté d’âme déployée par certains scélérats. En moins de quinze jours, l’extrême pâleur de Lamiel sembla diminuer. La duchesse le remarquait un jour.

— Eh bien ! madame, s’écria Sansfin avec hauteur, est-ce qu’il convient d’appeler des médecins de Paris quand on a un docteur Sansfin dans le voisinage ? Un curé peut avoir de l’esprit, mais quand cet esprit est troublé par l’envie, il ressemble comme deux gouttes d’eau à de la sottise.