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duis-toi sans bruit dans son palais, fais-toi conduire chez le valet de chambre ; je ne voudrais pas qu’on réveillât monseigneur. S’il est déjà renfermé dans sa chambre, passe la nuit dans le palais, et, comme il est dans l’usage de se lever avec le jour, demain matin, à quatre heures, fais-toi annoncer de ma part, demande sa bénédiction au saint archevêque, remets-lui le paquet que voici, et prends les lettres qu’il te donnera peut-être pour Bologne.

La duchesse adressait à l’archevêque l’original même du billet du prince ; comme ce billet était relatif à son premier grand-vicaire, elle le priait de le déposer aux archives de l’archevêché, où elle espérait que messieurs les grands-vicaires et les chanoines, collègues de son neveu, voudraient bien en prendre connaissance ; le tout sous la condition du plus profond secret.

La duchesse écrivait à monseigneur Landriani avec une familiarité qui devait charmer ce bon bourgeois ; la signature seule avait trois lignes ; la lettre, fort amicale, était suivie de ces mots : Angelina-Cornelia-Isola Valserra del Dongo, duchesse Sanseverina.

Je n’en ai pas tant écrit, je pense, se dit la duchesse en riant, depuis mon contrat de mariage avec le pauvre duc ; mais on ne mène ces gens-là que par ces choses, et aux yeux des bourgeois la caricature fait beauté. Elle ne put pas finir la soirée sans céder à la tentation d’écrire une lettre