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donner. Fabrice se cache et s’appelle là-bas M. Joseph Bossi ; ne va pas le trahir par étourderie, n’aie pas l’air de le connaître ; mes ennemis mettront peut-être des espions à tes trousses. Fabrice te renverra ici au bout de quelques heures ou de quelques jours ; c’est surtout en revenant qu’il faut redoubler de précautions pour ne pas le trahir.

— Ah ! les gens de la marquise Raversi ! s’écria le postillon ; nous les attendons, et si madame voulait, ils seraient bientôt exterminés.

— Un jour peut-être ! mais gardez-vous sur votre tête de rien faire sans mon ordre.

C’était la copie du billet du prince que la duchesse voulait envoyer à Fabrice ; elle ne put résister au plaisir de l’amuser, et ajouta un mot sur la scène qui avait amené le billet ; ce mot devint une lettre de dix pages. Elle fit rappeler le postillon.

— Tu ne peux partir, lui dit-elle, qu’à quatre heures, à porte ouvrante.

— Je comptais passer par le grand égout : j’aurais de l’eau jusqu’au menton, mais je passerais…

— Non, dit la duchesse, je ne veux pas exposer à prendre la fièvre un de mes plus fidèles serviteurs. Connais-tu quelqu’un chez monseigneur l’archevêque ?

— Le second cocher est mon ami.

— Voici une lettre pour ce saint prélat : intro-