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sous le portique et on la chargeait ; tous les domestiques qui n’avaient pas de travail à faire entouraient cette voiture, les larmes aux yeux. La Chékina, qui dans les grandes occasions entrait seule chez la duchesse, lui apprit tous ces détails.

— Fais-les monter, dit la duchesse ; un instant après elle passa dans la salle d’attente.

— On m’a promis, leur dit-elle, que la sentence contre mon neveu ne serait pas signée par le souverain (c’est ainsi qu’on parle en Italie) ; je suspens mon départ ; nous verrons si mes ennemis auront le crédit de faire changer cette résolution.

Après un petit silence, les domestiques se mirent à crier : Vive madame la duchesse ! et applaudirent avec fureur. La duchesse, qui était déjà dans la pièce voisine, reparut comme une actrice applaudie, fit une petite révérence pleine de grâce à ses gens et leur dit : Mes amis, je vous remercie. Si elle eût dit un mot, tous, en ce moment, eussent marché contre le palais pour l’attaquer. Elle fit un signe à un postillon, ancien contrebandier et homme dévoué, qui la suivit.

— Tu vas t’habiller en paysan aisé, tu sortiras de Parme comme tu pourras, tu loueras une sediola et tu iras aussi vite que possible à Bologne. Tu entreras à Bologne en promeneur et par la porte de Florence, et tu remettras à Fabrice, qui est au Pelegrino, un paquet que Chékina va te