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lui tiraient le fusil chacun de toutes ses forces. Giletti, beaucoup plus vigoureux, plaçant une main devant l’autre, avançait toujours vers la batterie, et était sur le point de s’emparer du fusil, lorsque Fabrice, pour l’empêcher d’en faire usage, fit partir le coup. Il avait bien observé auparavant que l’extrémité du fusil était à plus de trois pouces au-dessus de l’épaule de Giletti : la détonation eut lieu tout près de l’oreille de ce dernier. Il resta un peu étonné, mais se remit en un clin d’œil.

— Ah ! tu veux me faire sauter le crâne, canaille ! je vais te faire ton compte. Giletti jeta le fourreau de son épée de marquis, et fondit sur Fabrice avec une rapidité admirable. Celui-ci n’avait point d’arme et se vit perdu.

Il se sauva vers la voiture, qui était arrêtée à une dizaine de pas derrière Giletti ; il passa à gauche, et, saisissant de la main le ressort de la voiture, il tourna rapidement tout autour et repassa tout près de la portière droite qui était ouverte. Giletti, lancé avec ses grandes jambes et qui n’avait pas eu l’idée de se retenir au ressort de la voiture, fit plusieurs pas dans sa première direction avant de pouvoir s’arrêter. Au moment où Fabrice passait auprès de la portière ouverte, il entendit Marietta qui lui disait à demi-voix :

— Prends garde à toi ; il te tuera. Tiens !

Au même instant, Fabrice vit tomber de la por-