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— Songe qu’une proclamation, qu’un caprice du cœur précipite l’homme enthousiaste dans le parti contraire à celui qu’il a servi toute la vie !

— Moi enthousiaste ! répéta Fabrice ; étrange accusation ! je ne puis pas même être amoureux !

— Comment ? s’écria la duchesse.

— Quand j’ai l’honneur de faire la cour à une beauté, même de bonne naissance et dévote, je ne puis penser à elle que quand je la vois. Cet aveu fit une étrange impression sur la duchesse.

— Je te demande un mois, reprit Fabrice, pour prendre congé de madame C. de Novare et, ce qui est encore plus difficile, des châteaux en Espagne de toute ma vie. J’écrirai à ma mère, qui sera assez bonne pour venir me voir à Belgirate, sur la rive piémontaise du lac Majeur, et le trente et unième jour après celui-ci, je serai incognito dans Parme.

— Garde-t’en bien ! s’écria la duchesse. Elle ne voulait pas que le comte Mosca la vît parler à Fabrice.

Les mêmes personnages se revirent à Plaisance ; la duchesse cette fois était fort agitée ; un orage s’était élevé à la cour ; le parti de la marquise Raversi touchait au triomphe ; il était possible que le comte Mosca fût remplacé par le général Fabio Conti, chef de ce qu’on appelait à Parme le parti libéral. Excepté le nom du rival qui crois-