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aux cheveux fort noirs, remarquable par les diamants qu’elle portait dès le matin, et par le rouge dont elle couvrait ses joues, s’était déclarée d’avance l’ennemie de la duchesse, et, en la recevant chez elle, prit à tâche de commencer la guerre. Le duc Sanseverina, dans les lettres qu’il écrivait de ***, paraissait tellement enchanté de son ambassade, et surtout de l’espoir du grand cordon, que sa famille craignait qu’il ne laissât une partie de sa fortune à sa femme qu’il accablait de petits cadeaux. La Raversi, quoique régulièrement laide, avait pour amant le comte Baldi, le plus joli homme de la cour : en général elle réussissait à tout ce qu’elle entreprenait.

La duchesse tenait le plus grand état de maison. Le palais Sanseverina avait toujours été un des plus magnifiques de la ville de Parme, et le duc, à l’occasion de son ambassade et de son futur grand cordon, dépensait de fort grosses sommes pour l’embellir : la duchesse dirigeait les réparations.

Le comte avait deviné juste : peu de jours après la présentation de la duchesse, la jeune Clélia Conti vint à la cour : on l’avait faite chanoinesse. Afin de parer le coup que cette faveur pouvait avoir l’air de porter au crédit du comte, la duchesse donna une fête sous prétexte d’inaugurer le jardin de son palais, et, par ses façons pleines