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— Fabrice va être arrêté, s’écriait-elle en pleurant, et une fois en prison, Dieu sait quand il en sortira ! Son père le reniera !

Mme Pietranera et sa belle-sœur tinrent conseil avec deux ou trois amis intimes, et, quoi qu’ils pussent dire, la marquise voulut absolument faire partir son fils dès la nuit suivante.

— Mais tu vois bien, lui disait la comtesse, que le baron Binder sait que ton fils est ici ; cet homme n’est point méchant.

— Non, mais il veut plaire à l’empereur François.

— Mais s’il croyait utile à son avancement de jeter Fabrice en prison, il y serait déjà ; et c’est lui marquer une défiance injurieuse que de le faire sauver.

— Mais nous avouer qu’il sait où est Fabrice, c’est nous dire : Faites-le partir ! Non, je ne vivrai pas tant que je pourrai me répéter : Dans un quart d’heure mon fils peut être entre quatre murailles ! Quelle que soit l’ambition du baron Binder, ajoutait la marquise, il croit utile à sa position personnelle en ce pays d’afficher des ménagements pour un homme du rang de mon mari, et j’en vois une preuve dans cette ouverture de cœur singulière avec laquelle il avoue qu’il sait où prendre mon fils. Bien plus, le baron détaille complaisamment les deux contraventions dont Fabrice est accusé, d’après la dénonciation de son indigne