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la pensée et de l’art. M. Émile Zola n’a fait que résumer en un corps de doctrine un ensemble de tendances éparses dans la littérature de son temps ; il leur a donné un nom ; il en a été le parrain plus encore que le père.

Notre génération et celle qui suivit reconnurent Stendhal pour un aïeul, ou plutôt pour un précurseur ; et sa gloire n’en jaillit qu’avec plus de force pour avoir subi longtemps une dure compression. Les réactions sont toujours violentes. Il y avait dans les éloges dont nous l’accablions comme un secret plaisir à le venger du dédain qu’il avait souffert, — que dis-je ? — qu’il avait provoqué, cherché ! Nous lui savions un gré infini d’avoir fui la renommée avec autant de soin que d’autres courent après et la gueusent. Nous savions que le lendemain du jour où il paraissait un volume de lui, il prenait la poste et se sauvait à deux cents lieues pour n’en pas entendre parler, que jamais il n’avait quémandé chez les journalistes des articles à sa louange, et que pour dépister même les admirations banales, il signait ses ouvrages de noms bizarres, Cotonnet, Durand, Fabrice, afin de se donner la joie exquise d’être deviné par une demi-douzaine d’amateurs. Nous nous sommes aperçus depuis qu’il y avait bien de la pose dans cette fierté farouche ; que cet