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jamais aucun papier, et bien m’en prend : voici neuf lettres que la Sanseverina m’a écrites en différentes occasions. Vous allez partir tous les deux pour Gênes, vous chercherez parmi les galériens un ex-notaire nommé Burati, comme le grand poëte de Venise, ou Durati. Vous, comte Baldi, placez-vous à mon bureau et écrivez ce que je vais vous dicter.

« Une idée me vient et je t’écris ce mot. Je vais à ma chaumière près de Castelnovo ; si tu veux venir passer douze heures avec moi, je serai bien heureuse ; il n’y a, ce me semble, pas grand danger après ce qui vient de se passer ; les nuages s’éclaircissent. Cependant arrête-toi avant d’entrer dans Castelnovo ; tu trouveras sur la route un de mes gens, ils t’aiment tous à la folie. Tu garderas, bien entendu, le nom de Bossi pour ce petit voyage. On dit que tu as de la barbe comme le plus admirable capucin, et l’on ne t’a vu à Parme qu’avec la figure décente d’un grand vicaire. »

— Comprends-tu, Riscara ?

— Parfaitement ; mais le voyage à Gênes est un luxe inutile ; je connais un homme dans Parme qui, à la vérité, n’est pas encore aux galères, mais qui ne peut manquer d’y arriver. Il contrefera admirablement l’écriture de la Sanseverina.