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en rougissant jusqu’au blanc des yeux, et reprenant sa colère.

— Ce n’est pas tout ! répliqua la duchesse avec une fierté romaine ; dès ce soir, et, ajouta-t-elle en regardant la pendule, il est déjà onze heures et un quart ; dès ce soir Son Altesse Sérénissime enverra dire à la marquise Raversi qu’elle lui conseille d’aller à la campagne pour se délasser des fatigues qu’a dû lui causer un certain procès dont elle parlait dans son salon au commencement de la soirée. Le duc se promenait dans son cabinet comme un homme furieux.

— Vit-on jamais une telle femme ?… s’écriait-il ; elle me manque de respect.

La duchesse répondit avec une grâce parfaite :

— De la vie je n’ai eu l’idée de manquer de respect à Son Altesse Sérénissime ; Son Altesse a eu l’extrême condescendance de dire qu’elle parlait comme un ami à des amis. Je n’ai, du reste, aucune envie de rester à Parme, ajouta-t-elle en regardant le comte avec le dernier mépris. Ce regard décida le prince, jusqu’ici fort incertain, quoique ces paroles eussent semblé annoncer un engagement ; il se moquait fort des paroles.

Il y eut encore quelques mots d’échangés, mais enfin le comte Mosca reçut