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nuit il ne répondit aux signaux de la lampe que pour annoncer qu’il était malade. Le lendemain matin, dès les dix heures, Clélia ayant paru à la volière, il lui demanda, avec un ton de politesse cérémonieuse bien nouveau entre eux, pourquoi elle ne lui avait pas dit tout simplement qu’elle aimait le marquis Crescenzi, et qu’elle était sur le point de l’épouser.

— C’est que rien de tout cela n’est vrai, répondit Clélia avec impatience. Il est véritable aussi que le reste, de sa réponse fut moins net ; Fabrice le lui fit remarquer et profita de l’occasion pour renouveler la demande d’une entrevue. Clélia, qui voyait sa bonne foi mise en doute, l’accorda presque aussitôt, tout en lui faisant observer qu’elle se déshonorait à jamais aux yeux de Grillo. Le soir, quand la nuit fut faite, elle parut, accompagnée de sa femme de chambre, dans la chapelle de marbre noir ; elle s’arrêta au milieu, à côté de la lampe de veille ; la femme de chambre et Grillo retournèrent à trente pas auprès de la porte. Clélia, toute tremblante, avait préparé un beau discours ; son but était de ne point faire d’aveu compromettant, mais la logique de la passion est pressante ; le profond intérêt qu’elle met à savoir la vérité ne lui permet point de garder de vains ménagements,