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ramasse un fusil et une giberne, mets-toi à côté des soldats et fais comme eux, exactement. Mais, mon Dieu, je parie que tu ne sais pas seulement déchirer une cartouche.

Fabrice, fort piqué, avoua cependant à sa nouvelle amie qu’elle avait deviné juste.

— Pauvre petit ! il va être tué tout de suite ; vrai comme Dieu ! ça ne sera pas long. Il faut absolument que tu viennes avec moi, reprit la cantinière d’un air d’autorité.

— Mais je veux me battre.

— Tu te battras aussi va, le 6e léger est un fameux, et aujourd’hui il y en a pour tout le monde.

— Mais serons-nous bientôt à votre régiment ?

— Dans un quart d’heure tout au plus.

Recommandé par cette brave femme, se dit Fabrice, mon ignorance de toutes choses ne me fera pas prendre pour un espion, et je pourrai me battre. À ce moment, le bruit du canon redoubla, un coup n’attendait pas l’autre. C’est comme un chapelet, dit Fabrice.

— On commence à distinguer les feux de peloton, dit la vivandière en donnant un coup de fouet à son petit cheval qui semblait tout animé par le feu.