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sottise, se dit Fabrice, je me serai damné pour un péché qui ne me semblait point aimable.

À peine la petite tentative de combat fut-elle terminée, que plusieurs laquais en grande livrée parurent avec une chaise à porteurs dorée et peinte d’une façon bizarre : c’était une de ces chaises grotesques dont les masques se servent pendant le carnaval. Six hommes, le poignard à la main, prièrent Son Altesse d’y entrer, lui disant que l’air frais de la nuit pourrait nuire à sa voix ; on affectait les formes les plus respectueuses, le nom de prince était répété à chaque instant, et presque en criant. Le cortège commença à défiler. Fabrice compta dans la rue plus de cinquante hommes portant des torches allumées. Il pouvait être une heure du matin, tout le monde s’était mis aux fenêtres, la chose se passait avec une certaine gravité. Je craignais des coups de poignard de la part du comte M***, se dit Fabrice il se contente de se moquer de moi, je ne lui croyais pas tant de goût. Mais pense-t-il réellement avoir affaire au prince ? s’il sait que je ne suis que Fabrice, gare les coups de dague !

Ces cinquante hommes portant des torches et les vingt hommes armés, après s’être longtemps arrêtés sous les fenêtres