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ami de Ludovic ; il lui est arrivé un accident ce matin de l’autre côté du fleuve, il désire se sauver à Ferrare.

— Eh ! nous le passerons, dit le mari d’un air fort poli, nous avons la barque de Charles-Joseph.

Par une autre faiblesse de notre héros, que nous avouerons aussi naturellement que nous avons raconté sa peur dans le bureau de police au bout du pont, il avait les larmes aux yeux ; il était profondément attendri par le dévouement parfait qu’il rencontrait chez ces paysans ; il pensait aussi à la bonté caractéristique de sa tante ; il eût voulu pouvoir faire la fortune de ces gens. Ludovic rentra chargé d’un paquet.

— Adieu cet autre, lui dit le mari d’un air de bonne amitié.

— Il ne s’agit pas de ça, reprit Ludovic d’un ton fort alarmé, on commence à parler de vous, on a remarqué que vous avez hésité en entrant dans notre vicolo, et quittant la belle rue comme un homme qui chercherait à se cacher.

— Montez vite à la chambre, dit le mari.

Cette chambre, fort grande et fort belle, avait de la toile grise au lieu de vitres aux deux fenêtres ; on y voyait quatre lits larges chacun de six pieds et hauts de cinq.