Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, I, 1927, éd. Martineau.djvu/261

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des soldats des divers régiments de S. M. le Roi ; la bonne compagnie est respectueuse envers ses maîtres comme elle doit l’être ; mais j’avouerai que de la vie je n’ai souffert que les gens des basses classes me parlassent d’autre chose que du travail pour lequel je les paie.

— Peste ! dit le prince, quel sacre ! voici un oiseau bien stylé, c’est l’esprit de la Sanseverina. Piqué au jeu, le prince employa beaucoup d’adresse à faire parler Fabrice sur ce sujet si scabreux. Le jeune homme, animé par le danger, eut le bonheur de trouver des réponses admirables : c’est presque de l’insolence que d’afficher de l’amour pour son roi, disait-il, c’est de l’obéissance aveugle qu’on lui doit. À la vue de tant de prudence le prince eut presque de l’humeur ; il paraît que voici un homme d’esprit qui nous arrive de Naples, et je n’aime pas cette engeance ; un homme d’esprit a beau marcher dans les meilleurs principes et même de bonne foi, toujours par quelque côté il est cousin germain de Voltaire et de Rousseau.

Le prince se trouvait comme bravé par les manières si convenables et les réponses tellement inattaquables du jeune échappé de collège ; ce qu’il avait prévu n’arrivait point ; en un clin d’œil il prit le ton de