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m’a prié de vous faire le détail de la façon dont elle a arrangé ce vieux palais enfumé. Alors le prince, après s’être assis, s’est mis à faire la description de chacun de vos salons.

Il a passé plus de vingt-cinq minutes chez sa femme qui pleurait de joie ; malgré son esprit, elle n’a pas pu trouver un mot pour soutenir la conversation sur le ton léger que Son Altesse voulait bien lui donner.

Ce prince n’était point un méchant homme, quoi qu’en pussent dire les libéraux d’Italie. À la vérité, il avait fait jeter dans les prisons un assez bon nombre d’entre eux, mais c’était par peur, et il répétait quelquefois comme pour se consoler de certains souvenirs : Il vaut mieux tuer le diable que si le diable nous tue. Le lendemain de la soirée dont nous venons de parler, il était tout joyeux, il avait fait deux belles actions : aller au jeudi et parler à sa femme. À dîner, il lui adressa la parole ; en un mot, ce jeudi de madame Sanseverina amena une révolution d’intérieur dont tout Parme retentit ; la Raversi fut consternée, et la duchesse eut une double joie : elle avait pu être utile à son amant et l’avait trouvé plus épris que jamais.

Tout cela à cause d’une idée bien im-