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généalogie. Avant tout il convient à un homme de ton nom d’être un grand seigneur, noble, généreux, protecteur de la justice, destiné d’avance à se trouver à la tête de son ordre… et dans toute sa vie ne faisant qu’une coquinerie, mais celle-là fort utile.

— Ainsi voilà toutes mes illusions à vau-l’eau, disait Fabrice en soupirant profondément ; le sacrifice est cruel ! je l’avoue, je n’avais pas réfléchi à cette horreur pour l’enthousiasme et l’esprit, même exercés à leur profit, qui désormais va régner parmi les souverains absolus.

— Songe qu’une proclamation, qu’un caprice du cœur précipite l’homme enthousiaste dans le parti contraire à celui qu’il a servi toute la vie !

— Moi enthousiaste ! répéta Fabrice ; étrange accusation ! je ne puis pas même être amoureux !

— Comment ? s’écria la duchesse.

— Quand j’ai l’honneur de faire la cour à une beauté, même de bonne naissance, et dévote, je ne puis penser à elle que quand je la vois.

Cet aveu fit une étrange impression sur la duchesse.

— Je te demande un mois, reprit Fabrice, pour prendre congé de madame C. de Novare et, ce qui est encore plus difficile,