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mêmes. La vie réelle paraît ainsi calquée avec ses étranges caprices. Ce n’est jamais dans les événements que réside la logique, mais dans les sentiments des êtres emportés. Fabrice à tout instant demeure un jeune homme qui ne peut réprimer ses élans, et que suffit à entraîner non seulement la passion, mais encore la simple fantaisie du moment. On remarquera au reste que cet Italien, souvent donné comme un type opposé au caractère français et calculateur de Julien Sorel, nous a été discrètement présenté comme né d’un père français, et qu’il doit davantage son esprit d’aventure à un soldat de l’Empire qu’à ce que sa mère a pu lui transmettre de fougue italienne. Ce que lui dicte du reste son sang italien, Stendhal en réalité était bien placé et avait de bons yeux pour le saisir et nous le montrer. La tête farcie de ses Chroniques du XVe siècle, il n’en était que mieux à même de noter les traits de mœurs qui chez ses jeunes contemporains rappelaient la violence effrénée du Moyen-Âge. Pour le surplus l’Italie de Stendhal était celle qui avait laissé des reflets si pailletés dans ses jeunes yeux aux aguets du bonheur. Tous les personnages qui s’y meuvent sont pris hors de la condition commune c’est une loi qui vaut toujours et pour chacun de ses romans. Ses héros sont toujours des êtres d’exception.