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main droite aussi était enveloppée d’un linge sanglant. Ce sont les piétons qui vont sauter à la bride de mon cheval, se dit Fabrice mais, en y regardant de près, il vit que les piétons aussi étaient blessés.

— Au nom de l’honneur, lui dit l’officier qui portait les épaulettes de colonel, restez ici en vedette, et dites à tous les dragons, chasseurs et hussards que vous verrez, que le colonel Le Baron est dans l’auberge que voilà, et que je leur ordonne de venir me joindre. Le vieux colonel avait l’air navré de douleur ; dès le premier mot il avait fait la conquête de notre héros, qui lui répondit avec bon sens :

— Je suis bien jeune, monsieur, pour que l’on veuille m’écouter ; il faudrait un ordre écrit de votre main.

— Il a raison, dit le colonel en le regardant beaucoup ; écris l’ordre, La Rose, toi qui as une main droite.

Sans rien dire, La Rose tira de sa poche un petit livret de parchemin, écrivit quelques lignes, et, déchirant une feuille, la remit à Fabrice le colonel répéta l’ordre à celui-ci, ajoutant qu’après deux heures de faction il serait relevé, comme de juste, par un des trois cavaliers blessés qui étaient avec lui. Cela dit, il entra dans l’auberge avec ses hommes. Fabrice les regardait marcher et restait immobile au bout de