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toute spontanée et réfléchie, tour à tour sous les traits de Fabrice et sous ceux de Mosca. Ne cherchons pas davantage enfin si le chapitre de Waterloo, justement célèbre, a été inspiré à Stendhal par ce qu’il avait pu voir ou entendre des batailles rangées. Lut, qui ne fut ni à Marengo ni à Iéna, a peut-être utilisé ses souvenirs de la campagne de Russie et plus sûrement les images que lui avait laissées le champ de bataille de Bautzen dont le 21 mai 1813 il a tracé un récit excessivement pittoresque et qui annonce par plus d’un trait ce que seront, vingt-cinq ans plus tard, sous la même plume, les impressions de Fabrice del Dongo.

La part matérielle de l’invention de Stendhal peut donc être assez exactement mesurée par les friands d’histoire littéraire. Il y a là un monceau honorable de documents à inventorier et à peser. Mais à son ordinaire Stendhal a transfiguré le tout, ayant créé les caractères, l’atmosphère, la vraisemblance, le mouvement, la psychologie. Car la ressemblance de son roman avec les historiettes qui lui en ont donné l’idée ne va pas plus loin que la donnée extérieure. Nulle part nous n’avons vu ses prédécesseurs attacher d’importance aux motifs des actions humaines, ni à l’explication du cœur.

Est-il bien légitime alors d’affirmer comme certains n’ont pas craint de le faire, que