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journal de stendhal


— Je ne croyais pas que vous eussiez voulu y venir pendant quatorze mois.

— Vous savez bien pourquoi je n’y suis pas allé.

— Je croyais que les belles Brunswickoises vous retenaient. »

Pas de réponse de ma part, mon esprit manquait, si toutefois j’ai un esprit, ce qui n’est pas démontré.

Un instant après :

« Il y a bien longtemps que nous nous sommes quittés. Vous êtes-vous bien ennuyé ?

— J’ai beaucoup regretté que vous ne fussiez pas venue plus tôt, lorsque Vienne était jolie et que tout le monde vous attendait. Mais je ne me suis pas du tout ennuyé. »

Je crus devoir faire cette réponse à cause de J., dont tout le peu d’esprit tourne en méchanceté.

« On m’a dit que vous aviez été malade. Est-ce fini ?

— Oui, entièrement. »

Ça entre, je m’éclipse jusqu’au dîner, vais ouvrir un paquet de livres, couper et parcourir le Système moral de la femme, de Roussel*.

Dans cette première entrevue, on m’offrait, ce me semble, une place beaucoup plus élevée que celle que j’ai occupée jusqu’ici ; avec un ton plus résolu, je la prenais et acquérais une prépondérance immense, mais aussi j’affichais.