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1809 — 24 avril.
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allemagne

Nous retournâmes donc à Neustadt à la suite de M. D[aru], et cela par une route superbe, et directe, qui plus est.

Nous traversâmes quelque chaîne de montagnes, mais j’en ignore le nom. Nous passâmes à côté d’un pont brûlé, où l’on s’était battu la veille, et où je vis trois kaiserlicks morts ; ce sont les premiers. La route était entourée de bivouacs, elle a des parties on ne peut pas plus pittoresques. Il manquait à mon cœur, pour que le plaisir fût pur, qu’il ne s’y trouvât que l’amour de l’art et pas d’ambition ; mais je suis environné de gens qui jouent la comédie et à qui cette comédie réussit. Elle n’est pas difficile, mais elle exige tout le temps de ceux qui se livrent à ce genre. D’un autre côté, j’avais plus de plaisir qu’un jeune Anglais riche voyageant par cette même route. Je partais pour ce raisonnement du voyage de Moore, que je lis avec plaisir. Cette raison froide me console. Ce qui me manque, c’est plus de noblesse dans la disgrâce, et de n’en avoir pas du tout l’air piqué. À travers tous ces raisonnements, la route charmante s’écoulait, ce qui y nuisait encore, was the dulness of my partner*.


Nous arrivâmes enfin à Pfeffenhausen*. J’eus un moment de peur en y arrivant. J’étais à pied depuis une heure, tout à coup je vis une calèche derrière notre voiture, je crus que c’était M. D[aru] qui arrivait à son logement avant nous ; c’était l’excellent