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CHAPITRE LIII

L’Arabie.


C’est sous la tente noirâtre de l’Arabe Bédouin qu’il faut chercher le modèle et la patrie du véritable amour. Là comme ailleurs la solitude et un beau climat ont fait naître la plus noble des passions du cœur humain, celle qui pour trouver le bonheur a besoin de l’inspirer au même degré qu’elle le sent.

Il fallait, pour que l’amour parût tout ce qu’il peut être dans le cœur de l’homme, que l’égalité entre la maîtresse et son amant fût établie autant que possible. Elle n’existe point cette égalité dans notre triste Occident : une femme quittée est malheureuse ou déshonorée. Sous la tente de l’Arabe, la foi donnée ne peut pas se violer. Le mépris et la mort suivent immédiatement ce crime.

La générosité est si sacrée chez ce peuple qu’il est permis de voler pour donner. D’ailleurs les dangers y sont de tous les jours et la vie s’écoule toute pour ainsi